« DÉCOUVERTE DE SITES ANTIQUES EN PROVENCE ET CÔTE D’AZUR »
Du 20 au 23 avril 2023, 54 membres de l’ACAE sont partis à la découverte du sud-est de la France et de ses trésors antiques et médiévaux.
Halte à Orange
Après avoir suivi la vallée du Rhône, première halte : Orange, ancienne Arausio de l’époque romaine. Elle fut fondée en -106 par des légionnaires romains. On retrouve les classiques deux axes perpendiculaires de la ville antique : le cardo et le decumanus, ainsi que la division des parcelles en carrés. Le théâtre antique est construit dos à la colline Saint-Eutrope. Ce lieu qui accueille aujourd’hui les chorégies, montre combien la cité était riche et puissante. Par ses deux passages voûtés d’entrée, il pouvait accueillir jusqu’à 10 000 personnes. Deux galeries appelées « vomitoires », desservaient les gradins. Les spectateurs s’installaient suivant leur statut social, les riches (chevaliers et prêtres) en bas. Les esclaves et les mendiants étaient tout en haut, au poulailler.
Ce qui est exceptionnel à Orange, c’est d’avoir conservé le mur de scène. Richement décoré comme la façade d’un palais royal avec sa porte royale au centre pour l’entrée du personnage important, il mesure 37 m de haut et 103 m de long. Ce décor permanent présentait un total de 76 colonnes en marbre rosé de Vérone. Les frises structuraient la façade. Au centre, la statue d’Auguste d’une hauteur de 3,55 m le représente en commandant en chef. La conception même de l’ensemble assure une acoustique exceptionnelle (résonance, ondes du son) pour tous les spectateurs. À partir de l’an 476, le théâtre se transforma en quartier d’habitations.
La ville d’Orange est aussi connue pour son arc de triomphe à trois baies marquant l’entrée nord de la cité antique. Il date des années 20 après J.C. Les sculptures de ses différents panneaux rappellent aux passants des batailles navales comme celle d’Actium qui vit la victoire d’Octave, futur empereur Auguste. À noter une particularité sur ces bas-reliefs : la présence d’un étendard au sanglier tel que ceux qu’utilisaient les Gaulois.
Visite à Saint-Maximin-La-Sainte-Baume
Le deuxième arrêt de la journée fut Saint-Maximin. Ce lieu conserve la relique du crâne de sainte Marie-Madeleine, venue se réfugier à la Sainte-Baume dans une grotte près de la ville. Le mot « baume » signifie grotte en occitan. L’étude anthropologique du crâne le date du 1er siècle ap. JC. Le pèlerinage devint célèbre au XIIIe siècle lorsque Charles II d’Anjou redécouvrit la crypte et les reliques de Marie-Madeleine. Le pape Boniface VIII ordonna alors la construction d’une basilique, un bâtiment gothique qui ne fut jamais pleinement achevé.
L’actuel hôtel de ville près de la basilique est l’ancienne « hostellerie » construite entre 1750 et 1780 et financée par le roi de France et le comte de Provence.
La basilique Sainte Marie-Madeleine est aussi célèbre pour son orgue datant de 1774 et préservé lors de la Révolution, car le frère de Napoléon y faisait interpréter La Marseillaise. 8 caisses de 100 kg d’objets d’art n’en furent pas moins livrées aux révolutionnaires.
Tout près de là, le groupe fit ce soir-là sa dernière halte chez un viticulteur, le Domaine Saint-Jean-le-Vieux dont le vignoble porte l’appellation « Coteaux varois en Provence ». L’actuel viticulteur a ses ancêtres qui travaillaient déjà la vigne à cet endroit en 1660.
Les voyageurs auvergnats furent hébergés pendant la totalité du voyage au sanctuaire de Notre-Dame Laghet, à deux pas de Nice et de Monaco.
Le site archéologique du Mont-Bastide
Les visites du 2e jour débutèrent sur le site du village romain de Mont-Bastide, sur la Grande Corniche. Claude Salicis et Christian Desneige, archéologues à l’Institut de Préhistoire et d’archéologie Alpes Méditerranée (IPAAM) et amis de Christian Lautier, initiateur de ce voyage, présentèrent ce site archéologique d’habitat fortifié de hauteur. Par la même occasion, les Aiguepersois découvrirent que les sites archéologiques de la région demandaient un effort physique certain pour y accéder…
Les remparts du Mont-Bastide furent découverts au XIXe siècle. La butte sommitale d’une longueur de 27 m et d’une hauteur de 7 m, est tronquée dans sa partie supérieure. Elle supporte une plate-forme (11 m x 4,50 m) constituée par des apports de terre et des couches charbonneuses maintenus par des murettes. On y décompte 150 structures d’habitat ou de cellules, alignées et étagées sur la pente entre le rempart et la crête, Des rues, des ruelles, des escaliers de largeurs inégales, organisent les ilots. On y relève un réseau de conduits déversant les eaux pluviales dans des citernes. Les différentes campagnes de fouilles ont aussi mis au jour trois ensembles constitués d’un pressoir associé à un ou plusieurs bassins de décantation. Comme la quasi-totalité des sites archéologiques de la région de Nice, il n’est pas protégé et doit bénéficier des meilleurs soins pour les fouilles au cas où des promoteurs s’intéresseraient à ce terrain.
Le Trophée-d’Auguste à La-Turbie
Puis le groupe se dirigea vers le Trophée-d’Auguste, à La-Turbie.
Construit en -6 sur la via Amelia, il a pour objet de célébrer la victoire d’Auguste sur les tribus gauloises. Ils se trouvaient sur la frontière entre la Provence et les Alpes cisalpines. Au Moyen Âge, des fortifications furent construites pour protéger le village, mais Louis XIV ayant ordonné la destruction de toutes les forteresses de la région, on fit exploser le monument en 1705 et ses pierres furent réemployées pour construire l’église Saint-Pierre. Le Trophée-d’Auguste a été restauré dans les années 1930 grâce au mécénat d’Edward Tuck, un américain qui passait ses hivers à Monte- Carlo.
La Turbie. Le Trophée-d’Auguste.
Monaco
Après le déjeuner à Èze, les visiteurs ont rejoint le Rocher de Monaco pour un programme de visites des appartements d’État : salon Louis XIV, salle du Trône, chambre d’York et vue sur la chapelle palatine. Le Palais de Monaco est à l’origine une forteresse construite à partir de 1215, propriété des Grimaldi depuis 1297. C’est un bâtiment inspiré des palais génois. De nombreuses fresques recouvrent l’ensemble des galeries bordées d’arcades dans la cour du palais. On y retrouve notamment contée l’histoire d’Hercule.
Monaco. Le palais princier.
Près du port, après avoir traversé les installations du circuit de Formule 1, les Aiguepersois purent admirer la Collection Automobiles de SAS le Prince de Monaco. Près d’une centaine d’automobiles y sont présentées, représentant les grandes marques du XXe et du début du XXIe siècles. La scénographie montre leur utilisation lors des grands événements de la famille princière. Les Formules 1 sont accompagnées de films de leurs courses et des remises de prix.
Les hauteurs de Cimiez et la baie des Anges
Le 3e jour débuta par la visite du site archéologique de Cimiez, sur les hauteurs de Nice, où on observe les traces de l’occupation romaine avec, là aussi, le cardo et le decumanus se croisant au centre de la ville antique. Un monument se dégage de l’ensemble : les anciens thermes. L’accès aux ruines de Cemenelum s’est faite par la traversée d’une très ancienne oliveraie d’où on a un point de vue sur l’ensemble du site archéologique. Christian Lautier qui autrefois fouilla le site, et Olivier Paradis apportèrent les commentaires historiques nécessaires.
Empruntant la vallée du Paillon, fleuve côtier dont le lit est à sec, l’autocar se dirigea ensuite vers le centre-ville de Nice, ses vieux quartiers, son marché aux fleurs et épices du cours Saleya, sa promenade des Anglais, etc. Olivier Paradis guida le groupe vers la très théâtrale église baroque Sainte-Rita.
Plus par goût de la bonne cuisine que par contradiction, les organisateurs avaient choisi un très bon restaurant… gascon. Toutefois, en route vers ce lieu, un arrêt au bureau des légendes s’imposait avec l’histoire de sainte Réparate qui fut décapitée et dont le corps, placé dans une barque ayant dérivé, finit par atteindre la côte niçoise… la Baie des Anges.
Grasse et ses parfums
L’après-midi fut d’abord consacrée à la visite de Grasse, ville réputée pour ses parfumeurs. Le programme des Aiguepersois avait jeté son dévolu sur le parfumeur Molinard. Dans une ambiance de rose, jasmin, violette et autres tubéreuses venus du monde entier comme le patchouli d’Indonésie, la vanille ou l’ylang-ylang de Madagascar. Sur une base complexe de centaines d’essences différentes, Habanita fut le premier parfum « oriental » de la marque. Il a connu un grand succès et est toujours commercialisé.
Grasse. Le parfumeur Molinard.
Les huiles essentielles de chaque plante sont extraites pour servir de base aux eaux de parfum. Lors de la visite des anciennes installations, le groupe put admirer les anciens alambics en cuivre, qui servaient à ces extractions. Rien ne fut caché aux visiteurs et surtout pas les trois notes composant « la pyramide olfactive d’un parfum » : la note dite de tête qui se maintient entre 10 et 20 minutes, celle de cœur, de trois à quatre heures et enfin celle de fond, faite d’essences tenaces comme la vanille, le musc ou le bois.
Le retour pour la dernière nuit azuréenne emprunta les gorges du Loup avec un passage par le village de Tourette-sur-Loup, accroché à un éperon rocheux, puis un arrêt à Saint-Paul-de-Vence, cité des artistes, dont la luminosité et le calme (autrefois) inspirèrent écrivains et peintres comme en témoigne la présence de la Fondation Maeght, haut lieu de l’art contemporain.
Dernière étape, Arles
Sur le chemin du retour, une halte à Arles, Arelate, ancienne colonie romaine et centre religieux important dont la population put atteindre 40 000 habitants sous l’Antiquité. Des fouilles de 2008 ont permis de retrouver, enfoui sous les eaux du Rhône, un buste en marbre de César.
Le groupe s’arrêta au cloître Saint-Trophime édifié entre le XIIe et le XIVe siècle, puis à l’hôtel de ville datant de 1672-75. Les sculptures qui ponctuent chaque arcade sont magnifiques et d’une grande qualité d’exécution. Les thèmes essentiels de la décoration sont le Christ, les saints patrons de la ville et les saints des évangiles. Au nord du cloître, se trouve la salle capitulaire où sont exposées des tapisseries.
Puis, les Aiguepersois allèrent admirer la voûte du rez-de-chaussée de l’hôtel de ville qui date de 1673-75. C’est un chef-d’œuvre de découpe et d’assemblage de la pierre, la stéréotomie française. La voûte paraît être plate malgré une portée de 15 m.
Ce fut ensuite la visite de la cathédrale Saint-Trophime avec son extraordinaire tympan représentant le Jugement dernier et l’évêque saint Trophime au premier plan. Avant de repartir, les membres de l’Association culturelle firent enfin un détour à pied jusqu’au théâtre gallo-romain et aux arènes récemment restaurées.
Toutes ces découvertes, culturelles, architecturales et artistiques ont ravi les excursionnistes qui furent heureux d’avoir pu partager ces beaux moments et ces belles rencontres.
Les voyages de l’ACAE bénéficient d’une organisation attentive, préparée de longue date et généralement bien minutée, invitant les participants à de belles découvertes. Celui d’avril 2023 ne fera pas exception à la règle et les organisateurs doivent en être vivement remerciés.
Texte : N. Moulin
Images : C. Genest, N. Moulin, X – Droits réservés